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(Chose vue) Dans la rue l’homme et l’enfant se toisent l’un l’autre et ne marchent pas. Ni l’homme, ni l’enfant. L’enfant est les deux poings très serrés, les bras le long du corps. L’homme, les deux bras de l’homme brassent l’air de la ville. Les deux bras de l’homme font de larges mouvements circulaires. L’homme montre à l’enfant un côté de la rue puis l’autre et les voitures qui filent à toute allure. Les veines temporales mauves de l’homme grossissent à mesure que les ongles de l’enfant s’enfoncent dans ses petites paumes. L’homme gronde l’enfant. L’homme crie. La femme ne criait pas. L’homme apprend à se comporter avec l’enfant. L’homme manque de tendresse envers l’enfant qui le lui rend bien. L’enfant se renfrogne et répète qu’elle n’est pas un enfant. L’homme dit le contraire. L’homme dit à l’enfant qu’il est un enfant et qu’il est l’homme. L’enfant doit écouter l’homme. L’enfant doit faire ce que dit l’homme. L’enfant a peur et acquiesce. L’enfant ment mais l’homme ne le sait pas. Les bras de l’homme ne sont plus menaçants et les poings de l’enfant ne se desserrent pas. Les ongles s’enfoncent petit à petit dans le creux des mains de l’enfant. L’enfant sent battre le sang dans ses mains, n’ouvre pas les mains et refuse la main de l’homme qui lui tend la sienne. L’homme sourit, prononce quelques phrases apaisantes et propose encore sa main. L’enfant refuse la main de l’homme. L’homme pousse l’enfant d’un geste vif, l’homme fait vaciller l’enfant et l’oblige à marcher.

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